Frédéric Mitterrand sommé de s'expliquer
La polémique continuait d'enfler jeudi autour de Frédéric Mitterrand, rattrapé par des écrits datant de 2005 sur des expériences de tourisme sexuel : la gauche réclamait sa démission et la droite soutenait le ministre, mais tous attendaient désormais des explications.
Le neveu de l'ex-président s'est vu ainsi conseiller, voire sommer de toutes parts, de revenir sur son ouvrage "La mauvaise vie", où il confessait son penchant pour les "garçons" durant des séjours en Thaïlande, à l'origine d'une virulente campagne à retardement de l'extrême droite, reprise par les socialistes.
La polémique a été jugée suffisamment importante pour qu'une réunion soit organisée dans la matinée à l'Elysée sur son cas, a-t-on appris de sources proches de l'UMP. Il a été décidé ainsi que le ministre de la Culture devait s'expliquer. Ce devrait être chose faite dans le journal de 20H00 de TF1.
Le socialiste Arnaud Montebourg a exigé la "révocation" de M. Mitterrand, dont il a dénoncé les "pratiques sexuelles condamnables", tandis que Manuel Valls (PS) a demandé à Nicolas Sarkozy de statuer sur "son sort".
"Il s'agit des écrits non pas d'un intellectuel, non pas d'un présentateur de télévision simplement, mais d'un ministre, celui-ci doit s'expliquer", a martelé M. Valls.
Plus nuancée, Cécile Duflot (Verts) a appelé ne pas "pas faire d'amalgame entre pédophilie et homosexualité", appelant à "poser la question simplement" au ministre afin de dissiper l'ambiguïté.
Sous pression, le ministre de la Culture n'a jusqu'ici réagi que par un mépris laconique. "Etre traîné dans la boue par le Front national est un honneur", a-t-il dit, avant de qualifier plus tard de "honte" les critiques du porte-parole du PS Benoît Hamon fustigeant un "ministre consommateur".
Malgré l'embarras suscité dans les rangs de la droite, plusieurs membres du gouvernement sont montés au créneau pour défendre leur collègue, accusé par la vice-présidente du Front national, Marine Le Pen, de poser "une tache indélibile" sur la France.
Conseiller spécial de M. Sarkozy, Henri Guaino a qualifié d'"indigne" la polémique, soulignant qu'"il n'y avait pas de faits" contre lui.
"Le Premier ministre lui a fait part de son soutien personnel mercredi en marge du conseil des ministres", a-t-on indiqué dans l'entourage de François Fillon.
Lui-même tancé pour ses propos équivoques devant un militant UMP d'origine arabe, Brice Hortefeux (Intérieur) a récusé "les jugements à l'emporte-pièce".
Faire la part entre l'activité gouvernementale et la vie privée, le message a été relayé par Laurent Wauquiez (Emploi), qui a dénoncé une "politique de fond de cuve", tout en appelant M. Mitterrand à une clarification.
"Laissons Frédéric Mitterrand s'exprimer", a renchéri le porte-parole du gouvernement et ministre de l'Education Luc Chatel, choqué à l'idée qu'on "veuille fouiller dans le passé privé de responsables publics".
Opposé à toute "chasse à l'homme", le ministre du Travail et de la Famille Xavier Darcos l'a aussi exhorté à "répondre autrement que simplement par l'indignation".
Lors d'un rassemblement à Paris, Mme Le Pen s'est étonné qu'il n'y ait pas eu "de polémique plus tôt", en rappelant avoir agi en raison du soutien témoigné par M. Mitterrand à Roman Polanski, arrêté pour avoir eu, en 1977, des "relations sexuelles illégales" avec une mineure alors âgée de 13 ans.
"Ce n'est pas un combat de la droite contre la gauche mais de l'indignité contre l'honneur", a-t-elle clamé, en réclamant désormais la démission de chef de la diplomatie, Bernard Kouchner, pour avoir lui aussi pris la défense du cinéaste franco-polonais.