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Blog de la section PS Anzin

Sarkozy: « Juppé ? Ce type est fou ! »

5 Mars 2011 , Rédigé par José Pressoir Publié dans #Ump

Sarkozy: « Juppé ? Ce type est fou ! »

 

 

 

Maurice Szafran et Nicolas Domenach - Marianne |


Alain Juppé, nouvel homme fort du gouvernement, est loin d'être en odeur de sainteté auprès de Nicolas Sarkozy. Nous publions ici un extrait de « [Off] Ce que Nicolas Sarkozy n'aurait jamais dû nous dire », un livre de Nicolas Domenach et de Maurice Szafran qui retrace vingt années d'entretiens confidentiels avec le président. Vous retrouverez plus d'extraits de ce livre dans le Marianne de cette semaine.



Sarkozy: « Juppé ? Ce type est fou ! »
Nicolas Sarkozy a le jugement souvent expéditif. Les « nuls », « médiocres », « connards » ne valent pas qu’on s’y arrête. Mais Alain Juppé, lui, mérite un traitement à part. C’est le seul qu’il ait qualifié devant nous, et à plusieurs reprises, de « fou ». Une distinction très particulière, lorsqu’on sait qu’il ne supporte pas qu’on lui applique le même diagnostic, ou même qu’on suppute qu’il y ait quelques accès d’irrationalité dans sa passion démesurée pour le pouvoir et pour lui-même. Or, la folie juppéiste ne faisait aucun doute à ses yeux effarés, au point de lui avoir signifié – nous étions dans le bureau d’à côté – qu’il lui faudrait « trouver un psy d’urgence pour [s]e faire soigner » ! Parole d’expert !

L’aliéné Alain Juppé se contentait alors d’appeler celui qui venait d’être nommé ministre de l’Intérieur pour le féliciter et lui dire qu’il était désolé qu’il ne soit pas promu à Matignon. Explosion de rage de Nicolas Sarkozy : « Tu es complètement malade. C’est toi qui m’as poignardé dans le dos, et maintenant tu viens me présenter des condoléances ! » En politique, le coup de poignard par-derrière n’est tenu pour un art que lorsqu’on tient le manche. Quand vous vous êtes fait vous-même planter, vous criez à l’assassin, au meurtrier dément ! Le maire de Bordeaux « démentait » justement avec véhémence et proposait de l’inviter à déjeuner pour une mise au point amicale. Refus effronté de son interlocuteur qui lui conseillait fortement de consulter, l’accusait de lui avoir menti en prétendant le soutenir dans toute cette affaire alors qu’il avait poussé Raffarin en coulisse. Il finissait par raccrocher en lui disant que, « si un jour ils déjeunaient, c’est lui, Alain, qui paierait l’addition. Et elle serait salée ! »

Ils ont déjeuné, chez Guy Savoy, l’un des meilleurs restaurants parisiens. La soupe d’artichaut aux truffes, une spécialité de la maison, est le plat préféré du maire de Neuilly. Ça a coûté cher à celui de Bordeaux. Mais c’était le prix de la réconciliation. De façade. Car, si ces deux-là s’aimantaient, ils se révulsaient et se repoussaient tout autant. Du moins, aussi longtemps que l’un, le « fou » de Juppé, parut au-dessus de l’autre, le dominer, exercer une prééminence dans l’affection et l’estime de Chirac. Il y avait le fils préféré et le fils rebelle. Le favori, le dauphin reconnu et le mal-aimé, le rebuté, puis le banni. C’est le « malade » pourtant qui, dès le lendemain de la victoire de Chirac en 1995, avait, après Dominique de Villepin, demandé personnellement le retour en grâce de ce « traître » qui avait fait la campagne de l’infâme Balladur. Le nouveau président n’avait rien voulu savoir ni concéder. Or le Premier ministre Juppé, le soir même de la composition de son gouvernement, avait téléphoné à l’exilé de Neuilly pour lui exprimer toute sa sympathie.

« Sincèrement ? » avions-nous demandé interloqués à Sarkozy. Pour toute réponse, celui-ci avait éclaté de rire, avant d’ajouter : « Juppé respecte ma vitalité. Il veut savoir ce que je pense, à quoi je m’occupe. Au fond, il me craint parce que je travaille beaucoup plus que les autres et que j’ai dix ans de moins que lui. » La crainte ne serait-elle pas une manifestation de considération ? La réplique tombait, coupante : « Cet énarque normalien n’a aucun respect pour ceux qui n’ont pas fait l’Inspection des finances. Je ne vous parle même pas de l’ENA. » […]

Juppé, c’était pour lui désormais la figure paroxystique du technocrate devant lequel il se jurait de ne plus faire de complexe. « Il leur manque une case », nous disait-il. Ces « mabouls » ont perdu le contact avec la réalité.

Le diagnostic du Dr Sarkozy tenait en une phrase : « Ce mec n’est pas normal, il croit que tout lui est dû. » […]

Le soir de l’élection de Chirac en 1995, alors que Philippe Séguin, l’un des principaux artisans de la défaite balladurienne, échangeait sur le plateau de TFI de petits mots manuscrits avec Nicolas Sarkozy, le battu, le maudit – « Quand c’est qu’on va voir un match de foot ensemble ? » –, Juppé refusait de s’asseoir à côté de lui.

« Du délire, s’indignait encore Sarkozy quinze jours après. Ce malade avait même tourné le dos à Cécilia avant de s’enfermer dans une loge jusqu’à ce que je m’en aille. » Le maire de Neuilly n’en doutait pas : « Il a perdu les pédales, il veut me tuer. » L’ascension juppéiste aurait été trop fulgurante : « Alain avait disjoncté. » Et Sarkozy ajoutait, afin de trouver une raison à un comportement politique qu’il jugeait irrationnel : « Au fond, il a peur de moi. Il veut me tuer, consciemment ou inconsciemment. » Une sauvagerie brutale, primate serait dissimulée sous le masque de la civilité bourgeoise du Bordelais. « Nicolas » croyait avoir percé à jour la vérité, folle, meurtrière, d’« Alain » ! Voilà que nous ne comprenions pas bien : c’était le même personnage « odieux et fou » qui avait ensuite demandé à Chirac de reprendre le maire de Neuilly au gouvernement ! « C’est parce qu’il valait mieux m’avoir à l’intérieur qu’à l’extérieur. Juppé avait compris ça, que leur sectarisme allait me sauver, alors que j’aurais dû être mort. » […]
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